L’École Française Internationale de Wuhan (EFIW) a eu le privilège de recevoir Eric-Emmanuel Schmitt le mardi 26 novembre 2019. C’est un dramaturge, nouvelliste, romancier, réalisateur et comédien franco-belge, né le 28 mars 1960, à Sainte-Foy-lès-Lyon. Ses œuvres les plus connues sont : Oscar et la Dame Rose, Odette Toulemonde et autres histoires. Il occupe un fauteuil à l’Académie Royale de la langue et de la littérature française en Belgique et est considéré comme l’auteur le plus lu et étudié au collège et au lycée. Après un discours de présentation du Consul général de France à Wuhan, l’écrivain est monté sur la scène de l’auditorium. Il avait l’air très à l’aise, on sentait qu’il avait l’habitude de parler en public.
Eric-Emmanuel Schmitt a relaté son parcours et a répondu aux questions des élèves et des adultes qui s’étaient déplacés pour l’occasion. Cette rencontre a permis à l’assistance de connaître plus en détails le métier d’écrivain ainsi que la personnalité et le caractère de ce romancier publié et lu à travers le monde. Il a notamment déclaré qu’il avait trois maisons et que son passe-temps favori était la compagnie de ses chiens, au coin du feu, dans son manoir, à la campagne. Ce moment de paix lui permettrait de trouver l’inspiration. Nous avons aussi appris qu’il aime peindre les caractères de personnes qui l’ont marqué dans ses œuvres. Ce dramaturge a pour devise : « On fonce d’abord, on réfléchit après » et il nous a avoué avoir acheté une salle de théâtre juste à cause d’une adaptation du Journal d’Anne Frank qui, sans cela, n’aurait jamais pu être représentée.
Le conférencier a tenu l’auditoire en haleine pendant une heure avant que les élèves, qui doivent prendre la navette scolaire, rentrent chez eux. La rencontre s’est terminée par une séance de dédicaces.
Article rédigé par les élèves de quatrième et de seconde.
Eric-Emmanuel Schmitt en dix questions
1- Quel métier rêviez-vous d’exercer quand vous étiez enfant ?
Enfant j’écrivais déjà et tous mes proches avaient compris que je serai écrivain, mais pas moi… J’ai pensé à mille choses dont médecin car je voulais aider les autres, mais aussi cinéaste et diplomate car je voulais voyager. Quand j’écris je veux questionner des sujets terribles et montrer comment on peut habiter et dépasser les situations dramatiques de la vie, trouver un chemin de sagesse. Je ne suis pas devenu médecin, mais j’essaie de soigner les gens avec mes livres.
2- Qu’est-ce qui vous a conduit à devenir écrivain ?
Cette question revient à demander à un pommier pourquoi il fait des pommes et à un poirier pourquoi il fait des poires… Je sais que je suis sur terre pour écrire. J’ai besoin de mettre la vie en mots, c’est ma façon d’être au monde. On croit qu’on choisit son métier, mais souvent on est choisi. Je suis naturellement écrivain, mais je ne sais pas justifier cela ! J’écris parce que je suis là pour ça.
3- Que préférez-vous écrire : des romans, des pièces de théâtre, des essais, des bandes dessinées ou autre ?
Je n’ai pas de préférence. Ce sont les personnages et les situations qui commandent. C’est le sujet qui impose la forme. La Bande dessinée, par exemple, est née d’une situation familiale. Je racontais les aventures d’un poussin à mes proches. Le personnage d’Odette Toulemonde, quant à lui, ne pouvait pas être représenté autrement que dans un film puisqu’il faut voir cette femme qui s’élève, « s’envole » quand elle est contente. J’imagine la forme idéale qui collera le mieux au sujet, mais c’est elle qui s’impose d’elle-même.
4- Où trouvez-vous l’inspiration pour vos livres ?
Je trouve l’inspiration pour mes livres dans la vie. Je pars de la vie des gens et des vibrations d’énergie que je ressens. Je m’inspire aussi parfois d’autres œuvres.
5- Avez-vous un lieu de prédilection pour écrire ?
Oui, j’ai besoin de la chaleur de ma maison, j’aime écrire devant les flammes de la cheminée. Notamment dans ma vieille bâtisse du XVIe siècle, à la campagne, car je m’y sens en paix. Tout est alors facile. Cependant, une fois que le livre est commencé, je peux écrire partout car l’œuvre m’habite.
J’ai remarqué une chose surprenante qui m’étonnait fortement au début, mais que j’ai acceptée aujourd’hui, c’est que quand je commence un livre, je m’endors. C’est l’Hypnos qui veut dire « sommeil » en grec, qui m’emmène là où est l’histoire…
L’imaginaire me demande de passer par le rêve pour écrire. Je deviens une oreille qui va écouter ses personnages.
6- Quel(s) message(s) souhaitez-vous faire passer avec vos différentes créations ?
Il y a de nombreux messages mais avant tout, j’essaie de parler de chacun de nous. Toujours de façon bienveillante, de trouver l’endroit où nous sommes tous pareils. Je veux mettre en avant la seule chose qui nous rassemble, car quel que soit notre pays, nous nous posons tous les mêmes questions, seules les réponses que nous y apportons sont différentes. Je veux créer de la fraternité.
7- À ce jour, combien avez-vous écrit de livres ? Parmi tous les ouvrages que vous avez créés, lequel a votre préférence ? Pour quelle raison ?
Je n’en sais rien, je ne compte pas. On m’a dit 46 ou 47 volumes, mais je ne me suis jamais posé la question car cela m’est très naturel. Je me retiens car j’écrirais beaucoup plus ! En moyenne, je publie deux livres par an, mais je voudrais en faire bien davantage. Mon éditeur n’est pas d’accord et me limite. C’est un concept très moderne à mon sens car les hommes du passé se dépêchaient d’écrire et ne se restreignaient pas. Je pense qu’ils avaient cette idée que la vie est brève et qu’il n’y avait pas de temps à perdre. C’est ce sentiment qui me donne de la stimulation et me pousse à écrire. Cela me vient de la perte de ma maman qui est morte tôt. J’écris bien plus que ce que je publie et il y aura donc pas mal d’éditions posthumes…
Je n’ai de préférence pour aucun de mes livres. C’est comme si vous me demandiez lequel de mes enfants je préfère. Je les aime tous et s’il fallait absolument faire un choix, j’opterais pour l’ouvrage qui a reçu le moins d’amour de la part des lecteurs.
8- Etes-vous actuellement en train d’écrire une nouvelle œuvre ? Si oui, connaissez-vous déjà son titre ?
Oui, j’ai commencé un nouveau livre et j’avoue que je suis impatient de le poursuivre.
Le titre c’est le visage d’un livre donc parfois il y a une évidence mais ce n’est pas toujours le cas. Je ne trouve jamais le titre avant d’écrire. Par ailleurs, certains titres sont déjà pris et il faut alors changer. Ça a été le cas pour L’enfant de Noé que j’avais intitulé Les Enfants de Noé, mais il était déjà utilisé et j’ai dû y renoncer. J’avoue que le titre final ne me satisfait pas.
Quand je commence un livre, je connais simplement la première et la dernière phrase. Je vous invite à ce propos à lire la première et la dernière phrase de mes œuvres et à faire un lien…
9- Quel mot de la langue française préférez-vous ? Quel est le dernier mot que vous avez découvert en lisant ?
C’est une question difficile. Le mot de la langue française que je choisirais est « bienveillance ». Je ne me souviens pas du dernier mot que j’ai découvert en lisant ; je les connais tous !
10- Quelle serait, pour vous l’île idéale ? Accepteriez-vous de nous la décrire ?
J’ai déjà répondu à cette question dans un de mes livres : Lorsque j’étais une œuvre d’art. J’ai décrit une île paradisiaque et cruelle à la fois. Je vous invite donc à lire ce roman pour connaître mon île idéale.
Questionnaire préparé par les élèves de la classe de sixième.
Lors de sa conférence, Eric-Emmanuel Schmitt a accepté de se livrer à son public et de se soumettre à des questions en lien avec le célèbre questionnaire d’un de ses auteurs de prédilection, Marcel Proust. Les élèves de troisième vous proposent donc aujourd’hui ce questionnaire suivi d’un poème de leur composition sur l’auteur, brossant, à eux deux, un portrait composite de cet artiste aux mille talents.
1- Mes héros, mes héroïnes, dans la vie réelle ? « Ma mère car elle affronte tout avec le sourire. »
2- Ma devise ? « On fonce, on réfléchit après. »
3- Mon occupation préférée ? « L’écriture. »
4- Question d’Éric-Emmanuel Schmitt à Eric-Emmanuel Schmitt : « Qu’est-ce qui vous rend heureux ? Le bonheur des autres. »
Par les élèves de troisième.